Argumenter les indications, les contre-indications et les risques d’une anesthésie locale et loco-régionale.
INTRODUCTION :
La pratique de telles anesthésies font considérer d’une part l’utilisation des anesthésiques locaux (AL) et d’autre part les différentes techniques d’anesthésies. Les AL ont une toxicité propre induisant des risques et des contre-indications propres, et chaque technique d’anesthésie comporte ses indications et ses risques d’où découlent des contre-indications spécifiques.
UTILISATION DES AL :
Définition :
Ce sont des amines tertiaires rattachées à un noyau aromatique par une chaîne intermédiaire. Chacun est défini par un pKa et un caractère lipophile.
Aminoesters (ex : cocaïne, procaïne, chloroprocaïne, tétracaïne)
Aminoamides (ex : lidocaïne, prilocaïne, mépivacaïne, étidocaïne, bupivacaïne, ropivacaïne)
Effet anesthésique local (ou mécanisme d’action) :
Les AL bloquent de façon temporaire et réversible la propagation et l’amplitude des potentiels d’action membranaires en inactivant les canaux sodiques : ils inhibent les changements de conformation qui permettent normalement l’ouverture des canaux sodiques.
Toxicité des AL :
Elle est responsable des nombreuses précautions à prendre lors de la réalisation d’une anesthésie locorégionale. Elle est d’une part systémique (après injection intravasculaire accidentelle ou résorption vasculaire importante) et d’autre part locale.
• Toxicité locale des AL :
Elle concerne les fibres nerveuses au contact de l’AL. La dilution des solutions utilisées est telle que cette toxicité a peu de répercussion clinique. Un contact prolongé et à de fortes concentrations d’AL peut provoquer des lésions histologiques irréversibles.
• Toxicité systémique des AL (se voit lors d’une injection intraveineuse accidentelle de fortes doses d’AL) :
toxicité du SNC :
Cliniquement, elle se traduit d’abord par une somnolence ou une sensation ébrieuse, des céphalées, des acouphènes, une logorrhée, un goût métallique dans la bouche et des paresthésies péribuccales, ensuite par des tremblements et enfin par des convulsions généralisées (type tonico-cloniques).
Le tableau dépend de la rapidité et du niveau de concentration cérébrale en AL c’est à dire de la vitesse d’injection et de la quantité du produit administré (concentration et volume de la solution injectée).
toxicité cardiaque :
Elle est aussi dose-dépendante.
Les AL sont chronotropes négatifs (bradycardie sévère) et dromotropes négatifs (BAV, blocs de conduction avec TV et FV).
Remarque : les AL sont des antiarythmiques de la classe I (inhibition du courant sodique lors de la phase de dépolarisation).
Ils sont aussi de puissants inotropes négatifs (effet anticalcique, inhibition du métabolisme énergétique de la cellule myocardique).
De nombreux facteurs aggravent cette toxicité : hypoxie, hypercapnie, acidose, hyperkaliémie, hyponatrémie, hypothermie, grossesse, βbloquants, inhibiteurs calciques, antidépresseurs tricycliques.
allergies :
Elles concernent les aminoesters car ils sont des dérivés de l’acide βaminobenzoïque. Par contre les solutions des aminoamides contiennent un conservateur chimiquement proche de l’acide βaminobenzoïque pouvant aussi être allergisant.
TECHNIQUES D’ANESTHESIE LOCO-REGIONALE (ALR) :
Anesthésie locale par infiltration :
Tout AL peut être injecté en intradermique ou en sous-cutané. L’effet est alors immédiat et de durée dépendante de l’AL choisi (lidocaïne (Xylocaïne®) : 30 à 60 minutes, bupivacaïne (Marcaïne®) : 120 à 240 minutes). Le volume injecté dépend de la surface chirurgicale à anesthésier mais il faut toujours respecter les doses maximales autorisées (lidocaïne : 400 mg, bupivacaïne : 150 mg).
Anesthésie topique :
Cutanée, elle est assurée par une crème EMLA appliquée pendant 90 minutes au moins avant le geste. Elle ne procure qu’une anesthésie cutanée mais rend plus « confortables » toutes les ponctions transcutanées (principalement en pédiatrie et cancérologie).
En ophtalmologie, l’instillation d’un collyre anesthésique procure une anesthésie de la cornée, uniquement ne convenant qu’à la chirurgie de la cataracte sous certaines conditions (opérateur consentant, rapide et entraîné).
Anesthésie locorégionale intraveineuse (alriv) :
Elle consiste en une administration intraveineuse de l’AL en aval d’un garrot. L’AL diffuse de la vascularisation périphérique vers les fibres et les terminaisons nerveuses. Elle est intéressante pour la chirurgie du membre supérieur et éventuellement du pied, de durée inférieure à 1h.
La toxicité systémique des AL (en cas de fuite et au lâchage du garrot) explique que le garrot soit maintenu pendant une heure au moins et que seule la lidocaïne soit utilisée et à de faibles concentrations (0.5%). Elle est contre-indiquée en cas d’impossibilité d’obtenir une occlusion artérielle efficace (obèse, artéritique sévère).
Blocs périmédullaires (rachianesthésie et péridurale) :
L’injection de l’AL est réalisée en intradural pour la rachianesthésie (injection d’AL après avoir vu un léger reflux de LCR) et en extradural pour la péridurale (perte de résistance à l’entrée de cet espace virtuel) et induit une anesthésie (bloc moteur, sensitif et analgésique) de type métamérique.
Ils sont indiqués dans toute chirurgie de niveau inférieur à T10 d’une durée inférieure à 3h : périnéale, urologique, des membres inférieures (orthopédie et traumatologique, veineuse, pariétale abdominale (cures de hernie), gynécologique et obstétricale (césarienne urgente ou programmée).
Leur contre-indication spécifique est essentiellement l’hypovolémie à cause du bloc sympathique induit. Et les risques sont l’hypotention artérielle, une rétention d’urine, des chutes au premier lever (bloc moteur résiduel), des lombalgies et des céphalées « post ponction duremèrienne » (accidentelles avec la péridurale).
Blocs péripériques (plexiques et tronculaires) :
L’injection de l’AL est réalisée à proximité du plexus ou du tronc nerveux à bloquer une fois sa localisation faite grâce à des repères cutanés et profonds, et la neurostimulation.
Ils sont indiqués pour tout geste chirurgical strictement localisé au territoire bloqué, d’une durée limitée à 6h. Ils concernent principalement l’orthopédie (ex : syndrome du canal carpien, cure de l’hallux valgus) et la traumatologie (ex : exploration-suture de plaies).
Les risques sont spécifiques à chacune des nombreuses techniques et sont affaire de spécialistes. On peut donner à titre d’exemples : paralysie diaphragmatique (bloc du nerf phrénique) et bloc du plexus brachial au cou ; diffusion péridurale et intrathécale de la solution anesthésique et blocs plexiques.
Il en est de même pour les contre-indications, on peut citer : l’insuffisance respiratoire (paralysie diaphragmatique homolatérale constante) pour les blocs supraclaviculaires ; la fracture pertrochantérienne pour le bloc sciatique par voie antérieure ; la prothèse vasculaire fémorale pour le bloc fémoral.
RISQUES EN GENERAL :
• Echecs et insuffisances d’anesthésie
• Hématomes et dissections artérielles
ex : fistule artério-veineuse du creux axillaire après bloc « axillaire »
• Infections :
ex : méningites et blocs périmédullaires, abcès du psoas et bloc du plexus lombaire
• Perforation d’organes :
ex : pneumothorax, perforation artérielle (vertébrale ou sous clavière), espaces péridural et intrathécal après bloc du plexus brachial au cou
• Lésions neurologiques :
localisation nerveuse traumatisante ou injection intraneurale ou solution injectée toxique
• « effets » du bloc nerveux :
attention aux « agressions » dans un territoire endormi (brûlures, compressions), au lever
• Erreur sur le produit injecté
ex : antiseptique, sérum physiologique
CONTRE-NDICATIONS GENERALES :
• Refus ferme et motivé du patient
• Infection au point de ponction
• Troubles de l’hémostase et compression artérielle locale impossible
- Contre-indication à l’utilisation des AL (allergie aux AL, cardiopathies, βbloquants, inhibiteurs calciques)
- Troubles neurologiques suspects ou mal étiquetés
CONCLUSION :
La connaissance des indications et limites (risques et contre-indications) de ces techniques est primordiale pour une bonne prise en charge. Une « ALR » est réussie quand le confort du patient a toujours été obtenu, le relais avec le traitement antalgique a été anticipé et, surtout si le patient redemande la même technique pour une intervention similaire ultérieure.
Pages
- Accueil
- Anesthésie Générale
- Pharmacologie Générale Des Anesthésiques Locaux
- Intubation Trachéale
- Anesthésie Et Diabète
- Anesthésie Et La Chirurgie Traumatologique
- Les Comas
- Hypertension Artérielle
- L'appendicite
- Interprutation D'ECG
- Anatomie Physiologie L'Appareil Respiratoire
- Anesthésie Loco-Régionale
- Anatomie Physiologie De L'Appareil Rénale
- Anesthésie De La Femme Enceinte
- Anesthésie pour césarienne
- Préparation de salle D'intervention
- la feuille d'anesthésie
- Déroulement D'une Intervention
- Aspiration
- Abord veineux
- Chlorhydrate de morphine
Complications
RépondreSupprimer